CONVENTION OSPAR POUR LA PROTECTION DU MILIEU MARIN DE L’ATLANTIQUE DU NORD-EST
BILAN DE SANTÉ 2000 : RÉGION II –MER DU NORD AU SENS LARGE SOMMAIRE
Introduction
Ce rapport fait partie d'une série de cinq rapports dits "bilans de santé régionaux", préparés par la Commission OSPAR, dans le cadre de l'engagement à produire le premier bilan de santé de l’Atlantique du Nord-Est en l’an 2000. Le rapport présente une évaluation de l'environnement marin et de ses évolutions dans cette partie de la zone maritime de la Convention d’OSPAR connue, pour les besoins de l’évaluation, sous le nom de mer du Nord au sens large. La mer du Nord au sens large est considérée comme étant limitée par les côtes d’Angleterre, d’Écosse, de Norvège, de Suède, du Danemark, d’Allemagne, des Pays-Bas, de Belgique et de France, et par des lignes fictives délimitant les approches occidentales de la Manche (5° Ouest), l’Atlantique Nord entre l’Écosse et la Norvège (62° Nord, 5° Ouest), et la Baltique dans les Détroits danois. Ce bilan de santé analyse les informations rassemblées jusqu’en 1999, avec pour objectif de définir l’état actuel et les changements dans le temps observés en mer du Nord au sens large, en se basant sur le bilan de santé précédent, le QSR 1993. Les sujets suivants sont traités après le chapitre d’introduction : géographie, hydrographie et climat (Chapitre 2), activités humaines (Chapitre 3), chimie (Chapitre 4) et biologie (Chapitre 5). Le Chapitre 6 fournit une évaluation globale de la qualité de la mer du Nord au sens large.
Evaluation globale
Les améliorations générales qui ont été réalisées et les moyens fournis pour poursuivre ces progrès, par la mise en oeuvre des stratégies OSPAR et d’autres programmes, sont rassurants. Les apports de métaux lourds, d'hydrocarbures et de sous-produits de raffineries, et aussi de phosphore ont sensiblement diminué. De plus, l'immersion des boues d’épuration a cessé en 1998, et le nombre des produits chimiques utilisés en aquaculture marine a diminué. En revanche, certaines activités sont toujours sources d’inquiétude, en raison de l’étendue de leurs répercussions permanentes ou de leur évolution croissante, comme l’impact des pêches, des apports d'azote provenant de l’agriculture, et des apports de pétrole et de produits chimiques associés aux quantités croissantes d’eau produite par l’exploitation du gaz et du pétrole en mer. Les concentrations de tributylétain (TBT), agent antisalissure, dépassent toujours les niveaux de sécurité dans les zones maritimes, et les effets biologiques demeurent un phénomène commun en mer du Nord au sens large. On détecte, à l’heure actuelle, un nombre croissant de composés synthétiques dont on ne connaît pas la signification écologique. Bien que les impacts dus aux dragages aient diminué en raison de la réduction des charges contaminantes, on peut s’attendre à ce que les quantités de déblais de dragage augmentent à l’avenir puisque l’augmentation de charge des navires, en terme de taille, est prévisible. Les impacts des activités humaines sont plus importants dans les zones côtières. De nombreux milieux sensibles de grande importance écologique sont perturbés ou disparaissent à cause de l'influence des activités. Il est prévisible que les développements démographiques et que les changements climatiques aient des impacts significatifs.En conclusion, l’utilisation intensive – parfois conflictuelle – de la mer du Nord au sens large, provoque un certain nombre de problèmes en perspective d'un écosystème sain et d'une utilisation durable. Les écosystèmes continuent de souffrir d’un certain nombre de problèmes anciens, montrant parfois quelques signes d’amélioration, mais de nouveaux problèmes sont aussi survenus. Les effets des substances dangereuses, l’eutrophisation, et les impacts, aussi bien directs qu’indirects, des pêches couvrent les questions les plus préoccupantes.
Principales pressions humaines
Pour identifier les impacts préoccupants, les pressions humaines exercées sur l’environnement de la mer du Nord au sens large ont été classées en quatre catégories de priorité, à l’aide d’une expertise dont les résultats apparaissent au chapitre 6. Le chapitre s’articule autour des pressions d’importance, et fournit les informations relatives à leurs répercussions et à l’efficacité des mesures prises pour réduire les incidences indésirables. Il présente aussi des propositions pour les actions futures visant à obtenir des autorités compétentes un supplément d’examen. Bien que les impacts des pressions humaines classées dans les catégories de moindre priorité soient considérés comme étant de moindre importance, ceux-ci sont susceptibles de devenir plus sérieusement préoccupants lorsqu’ils sont combinés à d’autres pressions. De plus amples informations sont fournies dans les chapitres 2 à 5. Grâce à la très large portée de ses causes et effets, le changement climatique possède un potentiel d’impacts très significatifs en mer du Nord au sens large. Il peut influencer, dans l’Atlantique du Nord-Est, les facteurs qui contrôlent le climat de l’Europe occidentale. Les pressions humaines ont été classées en 4 catégories de priorité.
- Première classe de priorité
Les pêches
Les principaux impacts des pêches résultent du prélèvement des espèces cibles, de la perturbation des fonds marins par les engins remorqués de pêche de fond, des rejets des pêches accessoires et de la mortalité des espèces non ciblées. De nombreuses populations cibles de poissons se situent hors des Limites de Sécurité Biologique. Ces incidences sont largement étendues et importantes au plan écologique, et justifient pleinement le développement et la mise en oeuvre de l’approche par écosystèmes. Les recommandations pour les autorités compétentes sont de poursuivre les efforts visant à réduire la capacité des flottes, d’identifier des zones supplémentaires aux fins d'utilisation de zones fermées pouvant protéger les juvéniles et de zones fermées dans l’intérêt de préservation et de protection du benthos. Le développement des engins de pêche, réduisant ou éliminant les prises d’organismes non ciblés et limitant la perturbation du milieu, est aussi préconisé.
Contaminants organiques à l’état de tracesLes contaminants organiques à l’état de traces apparaissent dans toute la zone de la mer du Nord au sens large. Certains sont persistants et les périodes de récupération peuvent être très longues pour l’environnement. Certaines réductions de concentration ont pu être observées, mais on détecte par ailleurs un nombre croissant de composés synthétiques pour lesquels les effets écologiques sont très peu connus. Les recommandations appellent à multiplier les efforts de mise en oeuvre de la Stratégie OSPAR visant les substances dangereuses (OSPAR Strategy on Hazardous Substances) [nota : l’objectif de la Stratégie OSPAR visant les substances dangereuses est de prévenir la pollution de la zone maritime en réduisant progressivement les rejets, émissions et pertes de substances dangereuses, avec pour finalité de retrouver dans le milieu marin des concentrations proches des valeurs représentatives des substances produites naturellement, et proches de zéro pour les substances synthétiques anthropiques.], et des politiques convenues dans le cadre, par exemple, des Conférences de la mer du Nord au sens large, ou de l’Union Européenne et ou de l’Organisation Maritime Internationale.
NutrimentsLes apports anthropiques de nutriments peuvent provoquer des effets d’eutrophisation, à savoir par exemple, un accroissement des proliférations phytoplanctoniques et la raréfaction de l’oxygène. Les impacts les plus lourds sont reconnus dans les estuaires et les fjords, la mer de Wadden, la Baie d'Allemagne, le Kattegat et le Skagerrak oriental. Depuis 1985, la réduction de l’apport total de phosphore a été significative, mais malgré la diminution des apports directs de nutriments, la réduction de l’ensemble des apports n’est toujours pas discernable. Les principales recommandations sont de poursuivre vigoureusement la mise en oeuvre de la Stratégie OSPAR de lutte contre l’eutrophisation (OSPAR Strategy to Combat Eutrophication), et lorsqu’il y a lieu, les directives de la CE sur les nitrates et le traitement des eaux usées urbaines, et de concentrer les efforts de recherche sur les liens existants entre l’enrichissement en matières nutritives et les réponses des écosystèmes..
Pétrole et HAP
Les estimations fiables sur les apports de pétrole provenant des cours d’eau et des ruissellements des terres sont manquantes. Des réductions significatives sont notées pour les raffineries et pour l’industrie d’exploitation du gaz et du pétrole offshore, bien que pour cette dernière, les apports d’eau produite ont progressivement augmenté ces dernières années. Les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) sont largement répandus en mer du Nord au sens large, mais les apports ne sont pas connus. Des diminutions des apports de HAP sont prévues du fait de la réduction des apports de pétrole. Les recommandations incluent l’établissement de meilleures estimations des apports de pétrole et de HAP provenant de l’ensemble des sources telluriques, et des concentrations de HAP et de leurs effets sur l’environnement marin, réalisant ainsi les objectifs de la Stratégie OSPAR visant les activités d’exploitation de gaz et de pétrole offshore, et renforçant les mesures existantes pour garantir la poursuite de la diminution actuelle des décharges de pétrole illégales pratiquées par les bateaux.
Métaux lourdsLes mesures politiques ont prouvé leur efficacité dans la réduction des rejets et émissions de cadmium, mercure, plomb et cuivre, avec la diminution des concentrations dans les sédiments, l’eau et la matière vivante. En revanche, les incidences locales liées aux sources connues sont toujours évidentes. D’autres améliorations seront obtenues par la pleine réalisation de la Stratégie OSPAR visant les substances dangereuses.
Autres substances dangereuses provenant de sources basées en mer (autres que le pétrole, les HAP et les substances antisalissures)Les apports de substances dangereuses proviennent de l’industrie d’exploitation du gaz et du pétrole offshore, particulièrement par le biais de l’eau produite. Les informations actuellement disponibles sont trop limitées pour évaluer leurs répercussions. Les apports provenant du transport maritime sont constitués de produits chimiques, de substances lipophiles provenant du nettoyage des réservoirs, du carburant brûlé, des rejets de déchets et des pertes des cargos. Les recommandations réclament de plus amples informations sur les apports, les concentrations dans le milieu, le devenir des produits chimiques et les effets biologiques des produits chimiques dangereux concernés. Une mise en oeuvre effective de la Stratégie OSPAR visant les activités de gaz et de pétrole offshore, et de différentes Conventions internationales sur le transport maritime, devrait se poursuivre, avec un renforcement supplémentaire de la coopération pour le contrôle, l’application et les sanctions.
Impacts biologiquesL’introduction d’espèces non indigènes par le transport maritime et l’aquaculture marine, de même que la pollution microbiologique d’origine tellurique, sont susceptibles d’affecter la santé des organismes vivants (y compris celle des hommes) et la structure des écosystèmes. Il est recommandé d'enregistrer la présence des espèces non indigènes actuelles et de leur dispersion ultérieure, de même que la présence des toxines algales et des pathogènes comme le veut la Directive de l’UE sur la qualité sanitaire des mollusques.
Limites des connaissances
La limite des connaissances dans les domaines suivants est particulièrement importante :
- Les répercussions possibles du changement climatique ;
- Les substances dangereuses organiques. Il y a un manque de données générales dans ce domaine ;
Les produits chimiques de certains secteurs, à savoir par exemple : l’industrie en mer, le transport maritime et l’agriculture. Les informations relatives aux apports, aux concentrations environnementales et aux effets biologiques n’étaient pas immédiatement utilisables ;
Les effets chroniques et combinés des substances dangereuses sur les organismes, les concentrations entraînant un effet et les répercussions écologiques des substances affectant le système hormonal ;
Les informations quantitatives fiables sur les sources et les apports de nutriments, et leur relation avec l’eutrophisation, incluant le rôle des variations saisonnières ;
- La surveillance des tendances. A l’heure actuelle, les résultats obtenus dans la zone OSPAR, sur ce sujet, sont insatisfaisants ;
Les bilans et flux des substances, dans la zone de la mer du Nord au sens large et entre les régions OSPAR. Cela peut être traité par une meilleure harmonisation des efforts de surveillance ;
- Le manque de teneurs/ambiantes/de références et de critères d’évaluation écotoxicologique pour plusieurs substances dangereuses ;
- La modélisation des interactions multi-espèces dans les pêches.
- Les répercussions à long terme des pêches, particulièrement au regard des engins de pêche et de la variabilité saisonnière et spatiale des rejets accessoires ;
- Les données comparables sur les aspects économiques de l’utilisation de la mer du Nord au sens large;
- Les indicateurs d’évaluation relatifs au tourisme ;
Les objectifs de qualité écologique pour contribuer à la protection et à la préservation des écosystèmes et de la diversité biologique de la zone maritime
Recommandations
Le rapport de bilan de santé conclut avec les recommandations générales suivantes :
* Pour garantir une amélioration progressive de la qualité de la mer du Nord au sens large, des
ressources adéquates devront être mises à disposition en vue de la mise en oeuvre des Stratégies
OSPAR ;
* Les évaluations futures de la situation de qualité de la mer du Nord au sens large pourraient
bénéficier d’une coopération plus étroite avec d’autres forums mondiaux et européens ;
* Des mesures devraient être prises pour combler les lacunes mises en évidence par ce rapport,
particulièrement en ce qui concerne l’apparition et les effets des substances dangereuses dans
l’environnement marin ;
* Le développement des outils nécessaires à l’évaluation des substances et de leurs effets devrait
être poursuivi, en intégrant lorsqu’il y a lieu, la surveillance des effets biologiques et des produits
chimiques. Il est essentiel que le rassemblement des données soit plus efficace, par exemple, par
le biais d’études d'ensemble confiées à un laboratoire de référence ;
* L’impact des pressions humaines, supposé augmenter selon toutes vraisemblances, devra être
réétudié à court terme et permettre d’arrêter des mesures en conséquence ;
* Il sera nécessaire d’évaluer les implications des changements possibles associés au réchauffement
de la planète pour l’environnement de la mer du Nord au sens large;
* Les développements et applications de la méthode des écosystèmes devront être poursuivis pour
réaliser la protection et la préservation effectives des écosystèmes et de la diversité biologique en
mer du Nord au sens large.